Quel est donc ton parcours et quels liens entretiens-tu avec notre belle Ville de Pully?
C’est mon grand-père paternel qui est venu s’installer à Pully, âgé d’une vingtaine d’année, lorsqu’il a décroché un poste de facteur. A cette époque, Pully était encore considérée comme éloignée de Lausanne. Il a été le seul à postuler. Il a donc fait venir sa famille ici et nous y sommes tous restés. J’ai grandi à Pully et j’y ai fait toute ma scolarité de Chantemerle à l’Arnold-Reymond avant de faire mes classes économiques au gymnase d’Auguste Piccard à Lausanne. J’ai ensuite enchaîné avec des études en Science Sociales à l’UNIL où j’ai fait ma dernière année de Master à l’université de Madrid.
Comment as-tu été amenée à t’engager en politique?
Je ne suis pas du tout née dans une famille politisée, mais mes deux grands-papas avaient une vision doucement critique sur le monde avec une orientation plutôt de gauche qui m’a sûrement un peu guidée. Après la fin de mes études, je me suis engagée dans la coopération internationale, ce qui m’a amenée à partir en 2007 en Colombie pour poursuivre des études postgrades. J’ai pu travailler là-bas avec des populations vulnérables, dans le besoin, auprès d’une fondation. J’ai pu découvrir aussi un pays où il n’y a pas cette démocratie directe que l’on connaît ici. C’est en étant confrontée à un système politique différent, où il est difficile de faire entendre sa voix, où l’on voit les droits politiques et les droits citoyens bafoués, et lorsqu’on est mis en face de ces injustices, que ça nous fait réaliser la chance d’être dans un pays comme le nôtre, où il est possible de s’investir et de voter sur les trois niveaux, communal, cantonal et fédéral. Et cette chance là, il faut vraiment la saisir.
C’est donc à partir de cette expérience que tu as souhaité t’engager au sein du Conseil communal?
Pas directement. Ce séjour a continué à forger mes envies d’engagement, à renforcer chez moi ces valeurs de solidarité, de cohésion sociale et de partage. Des valeurs qui me tiennent à cœur depuis petite, mais qui se sont construites avec mes études et avec mon vécu dans un pays qui est encore aujourd’hui en conflit armé. Je trouvais qu’en étant dans la coopération internationale, c’était important de vivre cette expérience dans un pays en voie de développement, de participer au sein même du pays avec la population locale et pas d’être détachée de la problématique, confortablement depuis un siège à Berne.
Je suis revenue en Suisse pour diverses raisons, familiales mais aussi professionnelles. Je voulais me lancer dans une thèse sur la réintégration des combattants armés, une thématique qui m’avait beaucoup touchée en Colombie. Le choix de faire une thèse en Suisse sur ce sujet, m’a paru plus sage. On ne peut pas tout dire ni tout écrire dans un pays en conflit. C’est suite à ce retour, lors de mes études doctorales, que j’ai été approchée par Gérard Mielli et Pauline Tafelmacher qui connaissaient mes valeurs et ma manière de penser, et qui m’ont proposé de prendre un siège resté vacant au sein du Conseil communal. Malgré mes réserves en raison de l’investissement que me demandait le doctorat, ils m’ont rapidement convaincue.
Tu dis que tu avais des réserves. Rejoindre le Conseil communal, c’est quelque chose qui inquiète souvent les personnes qui se lancent. Quel est ton sentiment?
Ça peut effectivement impressionner d’être au Conseil, par la fonction, par la prise de parole devant 100 personnes. Mais c’était surtout la charge de travail qui m’inquiétait. Mon parti m’a laissé le temps de m’y mettre et je me suis prise au jeu. J’ai découvert cette manière de vivre la démocratie directe. C’est passionnant de pouvoir participer comme citoyen ou citoyenne, mais aussi, en tant que psychologue sociale de pouvoir observer différentes identités sociales qui se regroupent durant une soirée par mois pour discuter de leurs opinions plurielles, pour débattre. Ce qui m’intéresse beaucoup dans tout ça c’est la manière dont on est capable de travailler ensemble avec des personnes qui ont une vision totalement différente de la vôtre.
6 ans après ton entrée dans le Conseil communal, tu as été élue à sa présidence. Comment cela s’est-il passé?
Le comité du PS m’a approché pour me proposer cette fonction. Mon statut de femme jeune avec des enfants était bienvenu. J’ai pris mon temps, j’ai parlé avec beaucoup de monde pour savoir ce que cela représentait. Plus je me renseignais, plus la charge avait l’air d’être contraignante, mais je n’arrivais pas à dire non. J’avais trop envie de relever le défi, l’envie de présider le conseil, d’aller au bout de toutes ces valeurs démocratiques que j’aime défendre, et auxquelles j’aspire. J’ai donc dit «oui», et à ce moment là je me suis sentie bien, et lorsque l’on se sent bien, on sait qu’on a pris une bonne décision.
Quel regard portes-tu à présent sur cette fonction?
Je pense qu’en tant que présidente, on est garant de cette démocratie directe, de ce respect des opinions plurielles dans les débats au sein du Conseil. Et c’est ça qui me tient très à cœur justement de pouvoir laisser les groupes et individus débattre et amener leurs opinions quelques qu’elles soient. Même si elles peuvent paraitre difficilement compréhensibles pour un groupe ou un autre, l’important est qu’elles puissent être exprimées avec une écoute attentive et respectueuse de chacun, comme je l’ai rappelé lors de mon discours à la première séance.
Et comment se passe ton expérience après ces quelques premières séances ?
La première séance a nécessité beaucoup de préparation. Cette séance a été un vrai challenge à relever, très intense et complexe, avec des rebondissements, dont une résolution. Heureusement que j’avais pris congé ce jour-là, car en plus des heures de préparation en amont, j’ai passé ma journée à réviser le règlement, à appeler le Préfet, etc. Pour une première, on est sur la corde raide, on doit être au courant de tout, ne rien laisser passer. A 17h, j’étais encore en pyjama en train de travailler, c’est pour dire. C’est du stress, mais également beaucoup d’adrénaline positive. Présider une séance du Conseil, c’est une grande épreuve pour la confiance en soi, mais j’y prends énormément de plaisir. C’est le président qui donne le rythme et c’est une posture qu’on apprend assez vite à adopter et qu’au fil des Conseils on maîtrise mieux. Ça m’a servi d’avoir une première assez complexe qui m’a valu beaucoup de préparation, les séances suivantes ont ensuite été plus confortables et sereines.
Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour la suite de l’année ?
De l’endurance et du courage! Je prends cette année de présidence, durant une année d’élections et en fin de législature. Le mois de mars s’annonce chargé avec deux week-ends de dépouillement.
Et surtout, je souhaiterais pouvoir aller à la rencontre de la population, mais la situation sanitaire est ce qu’elle est, je n’ai pas eu beaucoup de représentations. Beaucoup de sociétés locales n’ont pas pu donner leur spectacle de fin d’année ou de repas de soutien. J’avais très envie d’aller à la rencontre de la population, de comprendre leurs besoins, d’expliquer aussi le rôle du Conseil Communal, ce que l’on y fait.
Je me réjouis aussi de voir la suite, la prochaine législature, la prochaine configuration du Conseil dont j’espère encore en faire partie. J’ai envie de continuer le travail que nous sommes en train de faire, continuer d’être proche de la population. C’est aussi quelque chose qui m’intéresse de dire aux Pulliérans que s’il y a quelque chose qui ne va pas, quelque chose que vous voulez améliorer, nous pouvons toujours discuter et faire avancer les choses. Le but est de travailler ensemble. Et je crois que c’est ce que l’on fait au Conseil: faire dialoguer pour le bien de notre commune.